Si l’on entre dans le bureau de poste de Créteil-lac pour aller retirer une lettre recommandée par exemple on se rend compte que c’en est fini des vitres anti-franchissement où l’on parlait au guichetier à travers un hygiaphone. On est dirigé vers des guichets dépendant du courrier avec une signalisation de couleur jaune ; on peut observer que la majeure partie des guichets est occupée par les guichets de la banque postale et de la caisse nationale d’épargne créées dès 1881 ; on y est conduit par une signalétique bleue. Le lieu ouvert au public comporte tous les attributs d’une agence bancaire, les conseillers financiers occupant des locaux contigus. La banque postale est annoncée en façade par un logo bien spécifique L’ancêtre de la banque postale sont les comptes de chèques postaux, les premiers qui aient été créés, en 1918.Pour assurer la pérennité de La Poste, l’Etat vis-à-vis des autorités européennes et les dirigeants de La Poste ont œuvré pour qu’elle exerce une activité pleine et entière de banquier. L’autorisation a été accordée, sous la forme d’une filiale au sein du groupe La Poste, pour des raisons concurrentielles vis-à-vis des autres banques. (La Poste (entreprise française)

 Cette face apparente ne révèle pas toute l’évolution de l’opérateur postal. C’était une pièce du puzzle d’une administration connue sous le couvert d’un ministère qui regroupait l’activité postale et celle des télécommunications ; cette entité a pu recevoir plusieurs dénominations (ministère des PTT, des Pet T..) suivant les compositions des gouvernements. En tout cas il est issu du très ancien ministère des postes et télégraphes institué en 1879. Pour assurer une concurrence équitable avec d’autres opérateurs, il a fallu instituer l’autonomie des deux opérateurs, poste et télécommunications. Alors qu’il s’agissait d’une activité sous monopole, La Poste a été plongée dans le grand bain concurrentiel, ce qui l’a contraint à se moderniser ; on ne parle plus d’usagers, mais de clients.

 Sans rapporter la grande histoire de La Poste, on peut rappeler qu’elle est née lors de la création des relais de la Poste en 1477 sous Louis XI, où seul le courrier royal était transporté. On ne peut passer sous silence l’histoire des boules de Moulins : en 1870 Paris est assiégé et on ne pouvait y faire acheminer le courrier venant de la province. Un moyen a été imaginé de le faire transporter par la Seine, enfermé dans des boîtes cylindriques, à partir de la ville de Moulins. D’où le nom des Boules de Moulins. Par ailleurs l’Affaire du courrier de Lyon en 1796 est demeurée dans toutes les mémoires. De la grande histoire à la petite histoire, citons celle de la visite du président de la poste japonaise auprès du président de La Poste ; il s’était attardé sur l’emblème de La Poste représenté par la photographie, un peu désuète, du facteur joué par Jacques Tati dans son film « jour de fête ». Y a-t-on pris la leçon ? Un nouveau logo illustre la politique de rénovation menée par La Poste.

 Nous pouvons trouver dans nos boîtes aux lettres des colis postaux distribués par des agents de la branche Coliposte ou par des entreprises sous-traitantes, en milieu urbain. En milieu rural la distribution est assurée par les facteurs. En amont les colis sont traités sur d’immenses plates-formes au moyen d’un équipement perfectionné permettant de limiter les manipulations. Une fois traités, ils sont chargés par des tapis roulants dans des semi-remorques ; en vrac pour optimiser les volumes de chargement.

 Chaque jour nous ouvrons notre boîte aux lettres pour retirer notre courrier. À Créteil il peut provenir de la plate-forme de distribution où se cachent les Pokémons. Ces centres de distribution regroupent, à l’arrivée, le courrier autrefois traité dans des bureaux de poste Il fait l’objet d’une préparation de la tournée du facteur avec le tri par quartier et rues, c’est le « coupage », puis par n° de rue, c’est le « piquage ». Ces opérations se font de plus en plus mécaniquement réduisant ainsi les temps de traitement.

 Le courrier collecté fait l’objet, au départ, d’une vaste opération de tri dans les plates-formes industrielles du courrier (Pic) Il s’agit de centres de tri de différentes tailles, mais bâtis sur le même modèle. Autrefois installés en centre-ville ils ont été déportés en périphérie proche de nœuds routiers, pour faciliter les accès. Comme leur nom l’indique, le courrier y est traité en masse suivant un processus de chaîne industrielle, au moyen de machines ultra-perfectionnées ; le courrier est lu, indexé et trié automatiquement. Les ingénieurs de l’administration des PTT ont conçu très tôt et développé en partenariat avec des industriels un système de lecture optique lisant les adresses ; ces lecteurs adossés aujourd’hui aux machines de tri sont très performants pour reconnaître les adresses, certaines plus ou moins lisibles. À défaut le courrier non lu par la machine est détourné pour apparaître sur des écrans de vidéocodage où des opérateurs visualisent l’adresse et la codifie ; le courrier indexé est alors réintégré dans la chaîne de traitement. Le tri des objets de correspondance se fait sur différentes machines selon qu’il s’agit d’un courrier petit format, grand format ou d’objet plat.

 Ce processus a contribué à faire disparaître le métier emblématique des « ambulants » ; c’étaient des agents chargés des opérations de tri dans des wagons aménagés à cet effet et attelés à des trains circulant de nuit. Le transport est aujourd’hui essentiellement assuré par voie routière. Le transport par le TGV a été supprimé faute de rentabilité et celui par avion, pour des raisons de développement durable n’est maintenu qu’exceptionnellement, en France métropolitaine, sur certaines liaisons. Dans cet objectif de rentabilité et de réduction de son empreinte carbone, La Poste s’est engagée sur un mode de transport combinant le fret ferroviaire et le transport routier, le transport aérien le cas échéant, et la voie fluviale, pour l’acheminement à la fois du courrier et des petites marchandises. L’important centre de centre de traitement installé à Bonneuil, commune voisine de Créteil, en est l’illustration.

 Outre la rentabilité c’est aussi la qualité de service qui est recherchée dans un marché totalement ouvert à la concurrence avec d’autres opérateurs. La concurrence est venue en réalité du courrier électronique des opérateurs fournisseurs d’accès d’internet. La Poste et France Télécom sont devenues des frères ennemis ! la perte consécutive du chiffre d’affaires du courrier contraint à mettre en place une organisation encore plus économe.

 À Créteil dans la zone d’activité des marais ont été rassemblés dans le même bâtiment les traitements du courrier et des colis, ces derniers constituant un marché en pleine expansion avec le développement du e- commerce. Dans cet ordre d’idées faute d’une activité suffisante, alors qu’est imposée à La Poste une obligation de présence territoriale, les bureaux de poste sont remplacés par des agences postales ou des agences communales. Dans le premier cas, le service est assuré par un commerçant, par un agent de la commune dans le deuxième cas ; les commerçants et les communes sont liés par convention avec La Poste. Du côté de la distribution, le facteur a de moins en moins de courrier à distribuer et son métier doit être renouvelé, essentiellement par des missions de service de proximité. L’obligation de service public impose à La Poste de faire des tournées 6 jours sur 7. Dans les communes rurales où le passage du facteur est attendu avec impatience, il peut être chargé d’assurer la livraison de médicaments pour les personnes âgées dans des villages isolés, voire de veiller sur elles en particulier en période de canicule. Des facteurs sont même chargés de veiller au bon état de la voirie et de notifier un état des lieux aux autorités locales dans les petites communes rurales. Finalement le facteur de Jacques Tati, par sa présence, n’est pas mort.

N’oubliez vos smartphones et entrez dans l’arène de combat sur la plate-forme de la Poste !